Installée au cœur de ville, la chapelle Saint-Yves abrita l’office de tourisme. Mais depuis le départ de Destination Rennes (autre nom de l’organisme) vers le couvent des Jacobins en 2019, elle est inoccupée. Elle serait mise en vente par la mairie pour une somme d’environ 2,8 M€. Une intention qui ne passe pas du tout auprès d’Antoine Cressard, élu de l’opposition du groupe Révéler rennes. « Cette annonce a choqué et inquiété de nombreux Rennaises et Rennais qui sont très attachés au patrimoine local », a-t-il fait savoir par la voix de sa présidente Carole Gandon, lors du dernier conseil municipal.
« Dernier vestige de l’ancien hôpital Saint Yves, la chapelle, qui date du XVe siècle, est le seul bâtiment de style gothique flamboyant de Rennes. Elle est classée au monument historique depuis 1945. Reconvertie au XIXe et au XXe siècle en entrepôt et magasin de quincaillerie, elle a été rachetée par la ville en 1982, après un long contentieux porté devant la Cour de cassation. Elle est ensuite restaurée, puis réaménagée afin d’abriter l’office de tourisme et le centre d’interprétation de l’architecture et du patrimoine à partir de 1998 à 2019.»
cette chapelle était un lieu de mémoire majeur, car, en plus de sa fonction sociale, le Parlement de Bretagne y avait siégé », avait rappelé l’ancien maire, Edmond Hervé, EN 1988.
Depuis 2019, Saint-Yves est seulement occupée, lors de quelques expositions temporaires. « N’étant plus chauffée, elle commence à se dégrader de façon inquiétante. La politique patrimoniale de notre collectivité est déroutante. En tant que ville d’art et d’histoire, Rennes a des obligations. Elle ne peut pas se débarrasser d’un tel bâtiment pour de mauvaises raisons, probablement financières. Nous sommes persuadés qu’il existe des solutions pour trouver une nouvelle affectation à ce monument (convention avec d’autres collectivités locales, mécénat…), sans être obligé de le vendre au secteur privé. Car, une fois chez un privé, on ne pourra plus maîtriser le devenir de l’édifice et l’on pourrait à terme le regretter. »
Piquée au vif, Nathalie Appéré, maire de Rennes, a tenu à réagir. « C’est sans doute au titre d’une politique patrimoniale déroutante que nous avons restauré le couvent des Jacobins. C’est sans doute aussi au nom d’une politique patrimoniale déroutante que nous avons investi dans la restauration des portes Mordelaises, acquis La tour du Chêne et déjà rénové un peu plus de 300 immeubles du centre historique. » Mais au-delà de sa politique patrimoniale, elle tient à préciser un fait ! « Conservation et préservation patrimoniale ne veulent pas, toujours et forcément, dire propriété publique. Il y a d’autres exemples d’évolution d’un certain nombre de biens qui ont été, non seulement protégés, mais aussi restaurés et rénovés, grâce d’autres formes de montages. Par exemple, l’hôtel d’artillerie a été cédé par l’État pour des raisons d’optimisation patrimoniale et faute d’usage. Son acheteur n’en devra pas moins respecter un nombre de prescriptions fixé par les monuments historiques. Son usage devra être totalement compatible évidemment avec la préservation patrimoniale. »
La salle du Jeu de Paume est assez emblématique de la rénovation publique », Nathalie Appéré.
« Encore une fois, ajoute-t-elle, nous avons des outils aujourd’hui qui permettent d’avoir véritablement un contrôle extrêmement approfondi sur le respect du patrimoine dans sa réhabilitation. » Toujours selon la maire, des bâtiments, comme la chapelle Saint Yves, peuvent connaître des utilisations différents, même commerciaux. « Cela fait partie de l’évolution du patrimoine. » Mais aujourd’hui, elle avoue ne pas connaître l’avenir de cet ouvrage. « Ce bâtiment n’est à ce jour pas inscrit dans son plan de cession, mais l’instruction doit se poursuivre sur son usage le plus adapté. Peut-être sera-t-il public ? Peut-être ne le sera-t-il pas ? » Espérons seulement que son sort sera décidé dans un futur court ! La prison Jacques Cartier est toujours dans un « projet-processus », le manoir Baud-Chardonnet ne devrait pas être transformé en un grand lieu festif (comme prévu).
Infos + : La ville a racheté la tour Duchesne sur les remparts, autre bâtiment remarquable qui appartient comme la chapelle Saint Yves à l’ensemble patrimonial médiéval de Rennes. « C’est totalement contradictoire », estime Antoine Cressard.
