Au siècle dernier, l’abbé Chaupitre était vu d’un mauvais oeil par les médecins rennais. Il était accusé d’être un charlatan et régulièrement convoqué devant la justice. Il le vécut très mal. Des années plus tard, l’homéopathie est devenue une discipline comme une autre.
Né le 22 octobre 1859 à Gennes (et non à Rennes !) en Ille et Vilaine, Jean-Marie-Victor Chaupitre est le cadet d’une famille pauvre. D’une santé délicate, il n’est pas fait pour le travail de la terre. Sa famille décide donc de l’envoyer chez les frères de l’instruction chrétienne à Ploërmel (Morbihan). Novice un an plus tard, il devient frère instituteur. Mais nos chères têtes blondes lui font vivre…l’enfer.
Le temps passe. Chaupitre devient curé à Fontenay-les-Brüs dans l’Essonne. En 1904, victime d’un ulcère, il pense passer de vie à trépas. Mais coup de chance, il rencontre l’abbé Chauvel (1823-1910) qui lui conseille l’homéopathie. En quelques jours à peine, le curé reprend pied, retrouve l’appétit et… devient dans la foulée homéopathe.
La bonne parole homéopathique
En 1908, il rejoint Rennes où il porte la bonne parole homéopathique ! Mais dans notre bonne ville, on voit l’abbé d’un mauvais oeil. On suspecte le « guérisseur ». Les médecins et les pharmaciens d’Ille et Vilaine l’accusent d’exercer illégalement la médecine, en 1910. Contre ces accusations, notre abbé utilise l’ironie devant le tribunal de Rennes. « Puisque je guéris, à moi la loi, à moi le diplôme, à moi le droit de faire de la médecine, » répond notre ecclésiastique. Malgré l’éloquence, l’abbé est condamné à payer 200 francs d’amende et 200 francs de dommages et intérêts envers les plaignants.
De 1922 à 1928, le curé rennais multiplie les ennuis judiciaires. Il placarde des affiches et se trouve en prison à plusieurs reprises en 1923 et 1925 ! Lassé sans doute par ses démêlés judiciaires, il finit par s’exiler en Belgique en 1928. Mais entre temps, il avait fait quelques adeptes dans la capitale bretonne, dont le médecin Emmanuel Porteu de la Morandière soigné d’une septicémie.
Mort à Naples en 1934, l’abbé Chaupitre est salué en une du journal Ouest-Eclair. « Il était une personnalité de notre région. Il était même plus que cela : son nom était connu dans le monde entier car ses travaux comme ses médicaments lui avaient acquis une réputation universelle. » Mort trop tôt, l’abbé Chaupitre ne connut pas la notoriété nationale de ses remèdes. Sa marque est devenue l’une bannières du géant français de la phytothérapie : les laboratoires Arkopharma.
Journal Ouest-Eclair, le 27 avril 1934.
Pour en savoir plus : http://www.persee.fr/doc/pharm_0035-2349_1999_num_87_321_4931
Epitaphe sur sa tombe : «A la mémoire de M. l’Abbé Chaupitre (1859-1934). Il mit tout son cœur de prêtre et sa science médicale à soulager les maladies humaines qui de partout se présentaient à lui. »
Quelques condamnations : le 4 juin 1910, 200 Fr. d’amende et 200 Fr. de dommages-intérêts ; le 14 juillet 1911, 500 Fr. d’amende et 500 Fr. de dommages et intérêts ; le 13 décembre 1913, 1000 Fr. d’amende et 3000 Fr. de dommages et intérêts ;le 10 mars 1921, 600 Fr. d’amende et 10 000 francs de dommages et intérêts…