« On peut vivre sans amour, mais pas sans roses. » Cette citation du poète Jean Richepin aurait pu être écrite pour Rennes, tant le parc du Thabor fait chaque année la démonstration que la beauté, ici, fleurit à hauteur d’hommes. Dès les premiers jours de juin, la roseraie entre en pleine floraison, emplissant l’atmosphère de parfums, de visiteurs et de souvenirs proustiens.
Nichée à l’est du parc, la roseraie du Thabor n’est pas un simple décor, surplombant le lycée Saint-Vincent. Elle est née à la fin du XIXe siècle dans le sillage de l’ambition municipale de faire du Thabor un jardin d’exception. Avec ses massifs rigoureusement agencés et son organisation en carrés thématiques, elle devient rapidement un espace d’expérimentation reconnu. En 1990, un « Carré des roses anciennes » est même inauguré pour mettre en valeur les premières variétés de rosiers thé et leurs hybrides.
Aujourd’hui, ce sont plus de 2 000 rosiers, toutes formes confondues — buissons, grimpants, tiges, demi-tiges — qui occupent les lieux. Au centre, le « Carré des nouveautés » accueille les créations les plus récentes. Certaines portent la signature de rosiéristes internationaux, comme la Purple Voluptia, une rose violette au parfum oriental créée par l’Allemand Reinhard Noack.
Le monde est une rose, respire-la, et passe-la à ton voisin », disait Victor Hugo.
D’autres sont le fruit du travail de créateurs locaux : à Liffré, à quelques kilomètres de Rennes, Michel Adam compose des variétés qui marient générosité florale et finesse. Il est à l’origine de roses devenues emblématiques de la roseraie du Thabor, comme la Fanny Ardant, buisson à grandes fleurs primée au concours de Bagatelle en 2004, ou la Poulidor, clin d’œil tricolore au célèbre coureur cycliste, aux couleurs éclatantes.
La roseraie rend aussi hommage à des personnalités à travers certaines créations. La Julio Iglesias évoque, par ses teintes chaudes, les ritournelles du chanteur espagnol, tandis que la rose Good Morning, récompensée par une médaille d’or à Rome en 2008, semble saluer le promeneur dès l’aube. Chaque variété porte un récit, une intention, parfois une émotion figée dans un pétale. C’est peut-être cette richesse narrative, autant que botanique, qui fait revenir les visiteurs chaque année. Ce mois de juin, comme chaque année, le Thabor se pare de ses plus belles couleurs. Il n’est pas nécessaire d’aimer les roses pour s’y attarder…