La Bretagne sans ses ports n’est pas la Bretagne. À une heure, deux heures et trois heures de Rennes, nombreux sont les havres où l’on découvre les bateaux de pêche, les voiliers de course et les vieux gréements. Partons de port en port à la recherche de la Bretagne maritime.
Situé au nord-ouest de Belle-Île, à sept kilomètres de Palais, le petit port de pêche et de plaisance de Sauzon n’en finit pas de séduire les touristes. Il est niché au creux d’une ria aux effluves maritimes. On aime beaucoup son décor de carte postale, ses couleurs pastel et son charme discret.
La mer joue, ici, sans cesse à cache-cache au rythme du flux et du reflux des marées. Elle caresse de ses embruns les visages des promeneurs et embaume le petit village de son air iodé. On est dans la Provence bretonne où les cafés et restaurants accueillent pêle-mêle pêcheurs, peintres de la Marine et gars du pays.
Dans cette partie de l’île abritée des vents dominants, Sauzon conserve son âme et sa douceur de vivre. Il flotte dans ses ruelles fleuries un je-ne-sais-quoi de Montmartre océanique où les artistes puisent leur inspiration dans les paysages dessinés à l’encre de marine.
Dans le Finistère sud, partons à Port-Manech, à l’embouchure des rivières Aven et Belon, non loin de Pont-Aven. Jadis, on s’y rendait par le canot automobile affrété par le seul établissement hôtelier du village ou tout simplement par une barque depuis le petit port de Pont-Aven.
Dans les années 1920, Port-Manech était l’un des grands lieux bretons de villégiature. L’hôtel Julia accueillait des personnalités remarquées et remarquables. On y croisait volontiers Arletty, Jean Gabin… et le docteur Barnes (1872-1951), grand collectionneur américain des peintres de Pont-Aven.
À Port-Manech, les petites rues charmantes sont désormais bordées de belles propriétés et de maisons de pêcheurs d’autrefois. Elles mènent, toutes, vers la plage de sable fin et un petit port abrité des vents d’Ouest, mais un peu moins des coups de vent de Suroît et des houles. Derrière la digue, un sentier se poursuit quelques mètres plus loin vers le phare de Port-Manech, sur la pointe d’Ar Brechen. De là, le panorama est imprenable. Il s’étend de l’archipel des Glénan à l’île de Groix, avec le bruit des vagues en fond sonore.
Toujours dans le Finistère sud, la rivière de l’Aven serpente sur près de 40 kilomètres, le long de prairies, de falaises et de forêts. Elle se rétrécit à Rosbras, un lieu-dit de Riec-sur-Belon. Ici, le petit port, blotti sur la rive est, accueille près de 200 bateaux et tout autant de plaisanciers ravis par son caractère assurément breton.
En face, un second port était apprécié par le poète breton Xavier Grall. « À port Kerdruc, écrivait-il dans un de ses ouvrages, les soirs sont bleus sur les ardoises. » Il y aimait sans doute le bruit des mâts, la lumière des couchers de soleil et les navires amarrés en file indienne dans la rivière.
Entre les deux ports, notre cœur balance forcément… de tribord à bâbord. Kerdruc et Rosbras sont tout compte fait indissociables. Pour un oui ou pour un non, les habitants traversent facilement la rivière pour saluer un ami, chercher du pain et le savoir-faire des charpentiers de marine.
Le long d’une ria bordée de coquettes maisons, Clohars-Carnoët respire la mer. Elle est la patrie du peintre non figuratif Tal-Coat et de l’écrivaine Benoîte Groult qui appréciaient beaucoup son petit port : un concentré d’élégance marine, de pittoresque et de beauté naturelle.
Le port Doélan (tel est son nom) est éclairé par deux phares qui donnent la route à nos marins sourcilleux. L’un est rouge et blanc et le second est blanc et vert. Ils furent construits en 1860 à la demande de négociants quimpérois et font désormais la joie des photographes.
Ici, la pêche côtière et des marées donnent toujours le « la ». Sous la halle aux poissons, ses fidèles marins vendent toujours leur pêche du jour aux touristes et aux locaux. Pas de doute, ils sont les dignes héritiers de l’épopée de la sardine qui rassemblait à Clohars 24 sardiniers et près de 300 pêcheurs. Il y a quelques années, ce petit port fut le décor des aventures de « Doc Martin », un médecin lyonnais parachuté en Bretagne et joué par le comédien Thierry Lhermitte. L’été, le point de vue est vraiment exceptionnel au soleil couchant.
D’Audierne à la pointe du Raz, plusieurs ports-abris sont érigés le long du littoral du cap Sizun. Ils sont nichés dans des petites criques et le long de petites baies où les pêcheurs du coin amarraient leur bateau et les remontaient sur la terre ferme aux premiers frimas hivernaux ressentis. Au pied de la pointe de Brezellec, surplombant la mer à 70 mètres d’altitude, un petit port lilliputien se niche en contrebas. Impossible de le rater. On y accède par un escalier où la prudence est toujours de mise le long des marches particulièrement abruptes et sculptées dans la falaise.
Cet abri côtier reçut ses premiers aménagements en 1877. Rien de neuf ne fut toutefois à mentionner jusqu’en 1926, date à laquelle la municipalité de Cléden installa finalement un treuil pour hisser une trentaine de bateaux de pêche le long de la paroi rocheuse.
Le petit port est réputé très profond. On dit même qu’il pourrait abriter de gros navires. Quasi abandonnés par les professionnels de la mer, ses mouillages font en revanche la joie des plaisanciers contre les houles d’ouest et du sud. Ils sont pris d’assaut durant la saison estivale et offrent un magnifique point de vue sur la baie de Douarnenez et la presqu’île de Crozon.
Au cœur du Morbihan, Le Bono (notre photo) est un petit village paisible et authentique d’environ 2 267 âmes. Il abrite un pittoresque port aux allures de Valparaiso qui a connu autrefois une forte activité : environ quatre cents marins des plus courageux y travaillaient au début du XXe siècle à bord de leurs forbans (bateau typique du coin).
Le port fut bâti en plusieurs fois : la jetée en 1882, le terre-plein en 1902 et les quais en 1916. Il abrite aujourd’hui un seul et unique bateau de pêche, des voiliers, des vieux gréements, des vedettes d’excursions, mais aussi une réplique d’un forban à la coque de chêne noire et aux voiles rouges.
Pour admirer le port, direction le village de Pluneret (juste en face) ou le vieux pont suspendu qui le surplombe (notre choix romantique). Dans le prolongement de la rue principale de la commune, l’ouvrage piétonnier est couvert d’une chaussée en latte de bois et long de 96 mètres.
Cet édifice est aujourd’hui très prisé pour son magnifique panorama sur la rivière, les voiliers, les chantiers ostréicoles et la vallée. Il fut livré au public, le 1er octobre 1840. À maintes reprises, il fut consolidé — entre 1859 et 1863, en 1867, en 1869, en 1870 et en 1925. Il est inscrit à l’inventaire des Monuments historiques.
À Groix, les touristes ne poussent pas toujours vers Port-Lay, le plus petit port d’Europe. Bien à tort… Protégé par une digue, l’abri côtier est un endroit rêvé au soleil couchant quand les promeneurs, seuls ou accompagnés, se délectent des lumières du soir et des coques noires. Port-Lay s’est vite transformé en un hôtel de la mer pour petits bateaux de plaisance où les visiteurs se laissent conter les belles histoires des thoniers, de la conserverie Jégo et de l’école de pêche. On est dans une charmante adresse qui ressemble fort à Port-Racine (tout là-haut dans la Manche) et transforme volontiers les âmes des citadins en marins. Ici, le bout du monde fredonne un petit air de liberté amoureuse et replonge dans l’histoire des pêcheurs de Groix.
En contrebas des falaises les plus hautes de Bretagne (104 mètres), le port de Gwin Zegal propose un type de mouillage insolite. Cet abri côtier, propriété de la commune, est protégé des vents d’ouest et de nord par un brise-lames de 40 mètres de long sur 2,50 mètres de haut. Il peut accueillir sans difficulté particulière jusqu’à une trentaine de bateaux de pêcheurs ou encore de plaisanciers.
Ici, le dispositif portuaire, tout à fait ingénieux, remonterait au Ve siècle de notre ère. Il consiste à amarrer solidement les embarcations le long de troncs d’arbres de 15 mètres de haut et leurs racines, eux-mêmes maintenus dans des puits d’un 1, 50 m de profondeur. Classé au patrimoine maritime européen, Gwin Zegal se découvre du sentier du haut duquel les troncs hérissés sur la mer bleue et parfois turquoise apparaissent bien étranges et insolites aux promeneurs. En France, il existerait un seul autre port de ce type : le Port Mazou, à Porspoder, dans le Finistère.
Dans les Côtes-d’Armor, Dahouët était un port de Terre-Neuvas d’où les premiers marins sont partis vers l’Islande dès 1510. Ces temps sont désormais révolus. Situé dans une toute petite anse et accessible uniquement à marée haute, le port est maintenant dévolu à la plaisance et à la pêche côtière.
L’entrée du port est signalée par une grosse balise verte et gardée par la statue couverte de Notre-Dame de la Garde érigée en 1925. La passe est relativement dangereuse lors des coups de vent d’Ouest et de Nord-Ouest ! Le risque est en effet très grand de heurter les rochers qui affleurent à marée haute.
Les marins plus doués traverseront le goulet étroit sans écueil. Ils seront agréablement surpris par les chênes, les châtaigniers et les quelques villas qui bordent leur navigation. À l’arrivée, l’escale sera infiniment reposante dans un port plein de charme et de caractère où les bateaux de pêche ramassent des coquilles dans leurs dragues. Ici ou là, des petits établissements proposent le meilleur, à des prix élevés ou non. Difficile de faire son choix, avant de revenir sur Rennes. Sources : les lieux romantiques en Bretagne, Jean-Christophe Collet.