Christian Gourcuff a marqué le football breton et français de son empreinte. Aimé par beaucoup, critiqué parfois pour son côté bourru par certains, il n’a jamais laissé indifférent. Journaliste, Julien Gourbeyre revient dans un livre d’érudit sur les méthodes du gourou lorientais et rennais. « Derrière sa retenue que d’aucuns ont pris à tort pour de la froideur, voire de l’antipathie, je pouvais sentir à chaque fois ses idées trépigner, sa passion émerger », écrit le reporter dans Christian Gourcuff, ma quête de jeu idéal.
« Dans une société où le bavardage permanent est devenu une compétence, le brouhaha de l’ultra-médiatisation, la norme, Christian Gourcuff détonne par son authenticité », ajoute l’auteur. Au fil des pages de cet ouvrage-hommage, Julien Gourbeyre fait la lumière sur la cohérence d’une pensée et d’un modèle de jeu — un parmi d’autres. Il met aussi en exergue des valeurs humaines desquelles l’entraîneur breton ne s’est jamais départi durant sa carrière.
Passionné de foot, Christian Gourcuff est un héritier. Plus qu’un autre, il a su écouter les anciens comme Jean Prouff et le fondateur , François Thébaud, Il a su observer l’équipe du Barça de Pep Guardiola et celle du Milan AC de Sacchi. De ses références, il a en tiré des leçons et son fameux 4-4-2. « La construction d’un style de jeu passe inévitablement par la définition d’objectifs et de principes précis. Cette organisation sert de repères constants et simples aux joueurs, sans entraver leur créativité. »
Pendant plus de trente ans, au bord des terrains de foot, Christian Gourcuff a acquis une certitude. « Le 4-4-2 est le plus cohérent sur l’occupation de l’espace. Dans les faits, il favorise l’équilibre de l’équipe et permet une transition rapide entre les phases défensive et offensive. C’est un système qui n’est pas figé, ouvert à tous les profils. On peut avoir des attaquants rapides, des attaquants de soutien, des attaquants d’espace… Charge à l’entraîneur, ensuite, de trouver les complémentarités dans le respect de l’organisation. »
Je m’exprime seulement lorsque j’ai quelque chose à dire », aime à répéter le coach.
Avec Christian Gourcuff, le style et l’efficacité allaient souvent de pair. « Le public d’aujourd’hui recherche des idoles plus que l’esthétisme d’un collectif. » Avec lui, les entraînements devenaient parfois des cours théoriques. « Les aptitudes à sortir de la densité, à voir et à décider toujours plus vite restent des éléments prégnants du footballeur de haut niveau. J’ajouterais aussi la capacité à lutter dans les airs », répète-t-il à l’envi.
Adepte du beau jeu, Christian Gourcuff croit beaucoup à la longévité dans la carrière d’un club. « On se rend compte que les meilleurs entraîneurs ont réussi dans une seule équipe. Ce fut le cas avec Guy Roux, à Auxerre. » Longtemps perçu comme renfrogné, il se défend aujourd’hui. « J’ai souffert de cette image de type froid alors que j’étais en réalité quelqu’un d’anxieux, hypersensible, toujours à la recherche de la perfection, un insatisfait permanent. Il y a un réel décalage entre l’image que je donne et ce que je suis ; ce qui a nui certainement au message transmis aux gens et même aux joueurs. Ça, c’est quelque chose qui m’embête, car c’est sûrement de ma faute, j’aurais pu essayer d’être plus relâché. Le seul regret se situe peut-être là. »
Dans son expression sur le terrain, Yoann représentait tout ce à quoi j’ai toujours aspiré et qui me plaisait dans le foot :
Jusqu’au bout, Christian Gourcuff sera resté en phase avec ses valeurs. « Même lorsque je me suis senti en décalage, sur la fin, je n’ai pas perdu de vue mes priorités, à savoir le travail, le collectif et une certaine idée du football. Celle qui a tant nourri ma passion pendant toutes ces années : ma quête du jeu idéal. » Christian Gourcuff, Ma quête du jeu idéal, aux éditions Amphora.
