En mars 2023, Rennes Métropole a pris une décision radicale : suspendre le chantier du nouvel incinérateur de Villejean des déchets ménagers. En cause, des problèmes d’exécution des chaudières installées par la société italienne Ruths, chargée du projet. En juillet, le marché a été attribué à une seconde entreprise, Est industries Sentis, sur la base d’un rapport de Véritas. Cette décision, faisant fi d’une expertise favorable aux Transalpins, suscite une vive polémique parmi les élus de l’opposition municipale, qui pointent du doigt la gestion de la métropole..
Des élus d’opposition mécontents
Lors du conseil municipal du 16 septembre, Carole Gandon, cheffe du groupe Révéler Rennes, s’est adressée directement à Nathalie Appéré, présidente de Rennes Métropole et maire de Rennes. « Si vous souhaitez éviter, en plus d’un scandale financier et écologique, un scandale démocratique, je ne peux que vous encourager à faire preuve de la plus grande transparence et pédagogie », a-t-elle expliqué. « Rien ne vous obligeait à attribuer ce marché de substitution alors que Ruths s’était toujours déclaré prêt à reprendre le chantier », a-t-elle ajouté. « Rien ne justifiait non plus l’interruption des travaux depuis des semaines. Cette suspension coûte près de 3 millions d’euros par mois, soit, à ce jour, près de 80 millions d’euros pour la gestion des déchets ».
Face à ces critiques, Nathalie Appéré, a tenu à clarifier la position de la Métropole. « À partir du moment où des questions de sécurité sont soulevées, où aucune autorisation ne pouvait être donnée en l’état, nous étions dans l’obligation d’attribuer un autre marché. Je ne vois pas quel intérêt nous aurions eu à vouloir augmenter les coûts de cette opération », a-t-elle expliqué. Face au manque de transparence (évoquée également par Carole Gandon), Nathalie Appéré s’est là encore défendue bec et ongles. « Toutes les expertises ont été adressées aux conseillers métropolitains ainsi qu’à la presse. »
Seul hic, le rapport clé de Véritas (cité plus haut et daté du 4 juillet) n’a pas encore été transmis aux élus de la mission d’information et d’évaluation. « Bien évidemment, il sera communiqué comme tous les autres documents », a répondu Nathalie Appéré. « Mais il est parfaitement clair que cette dernière mission ne doit pas se substituer à l’exécutif ! Notre rôle était de prendre une décision, que cela vous plaise ou non, madame Gandon. Notre intérêt est de mettre en service l’unité de valorisation, dès le début de janvier 2026, dans de bonnes conditions de sécurité. »
Quid en revanche des indemnisations éventuelles à la société Ruths, écartée selon certains sans ménagement ? Quid de la responsabilité décennale du nouveau prestataire sur un équipement conçu par les mêmes Italiens ? Seule certitude : une bataille d’experts a conduit à une escalade des coûts pour les contribuables qui ne sera pas sans alimenter des débats locaux dans les années à venir. Cette confrontation de spécialistes ne sera pas non plus sans conséquence pour les Italiens qui, sur un marché des déchets ménagers extrêmement « juteux », pourraient se retrouver en difficulté face aux concurrents français. Là est peut-être le nœud gordien de cette affaire…