Devant le tribunal correctionnel de Rennes, ce 21 mars, des manifestants sont nombreux. Certains (Défense collective) ont monté un stand où l’on apprend à se comporter en cas d’arrestation. Ils sont une centaine, sous les yeux de quelques policiers en tenue contrôlant l’accès de la juridiction. À l’intérieur, deux jeunes sont devant la justice. L’un est un homme d’une vingtaine d’années, étudiant à Ker Lann, en deuxième année, dans une école nationale de statistique. L’autre est une femme, brillante étudiante en pharmacie en troisième année. Tous deux comparaissent devant le tribunal notamment pour des violences sur des vigiles et des dégradations commises en réunion devant le Mama Shelter, le jeudi 16 mars dernier.
Des larmes et des peurs
En détention provisoire depuis samedi soir, les prévenus demandent tous deux le renvoi de leur affaire à une date ultérieure pour préparer leur défense. Mais ils veulent surtout échapper à la prison. Muets au cours de leur audition, ils sont un peu plus diserts, devant les magistrats « J’ai peur de ne pas valider mon année, » explique l’étudiante, sans casier judiciaire. « J’ai déjà raté des travaux préparatoires obligatoires. » Devant les juges, la future pharmacienne, boursière, tente de se contenir ses larmes. Mais en évoquant ses proches, ses parents et grands-parents, assis au premier rang, elle craque avant qu’un policier (ironie du sort) ne lui prête un mouchoir pour essuyer ses sanglots.
C’est dommage que tous deux n’aient pas assumé leur engagement politique, » expliquait un avocat à la sortie de l’audience.
À côté d’elle dans le box des accusés, le jeune homme, à peine 20 ans, n’en mène pas large. Boursier, lui aussi, sans casier judiciaire, il est incarcéré pour la première fois depuis samedi soir, cinq jours, cinq nuits où il a eu le temps de réfléchir. « J’ai peur que mes études soient mises en péril », précise-t-il à la barre. Devant les prévenus, la procureure de la République rappelle la gravité des faits. « Pour éviter tout renouvellement, la détention provisoire était tout à fait justifiée », assène-t-elle. Mais à l’égard des accusés, elle fait preuve de mansuétude. Elle demande un contrôle judiciaire strict pour les deux étudiants, avec notamment une interdiction de manifester et de paraître dans la ville de Rennes. « Nous ne sommes pas une justice d’exception », ajoute-t-elle.
À l’énoncé des réquisitions, Olivier Pacheu et Nicolas Prigent, défenseurs des prévenus, étaient visiblement rassurés. Mais les deux hommes de loi ont toutefois enfoncé le clou. « Le message de sévérité doit s’arrêter ce soir », plaidait Nicolas Prigent. « Il y avait suffisamment d’éléments pour laisser libre ma cliente, dès samedi. C’était une situation déraisonnable », précisait le second. Le dossier est renvoyé le 20 avril prochain pour juger des faits. Pour l’heure, les deux jeunes sont soumis à un contrôle judiciaire et sont interdits de manifester. A la sortie de l’audience, leurs amis étaient visiblement heureux de la tournure des évènements.