Tatiana-Mosio Bongonga n’est pas à son premier exploit. Elle a déjà réalisé une traversée d’exception, en remontant les pentes de la Butte-Montmartre jusqu’à la basilique du Sacré-Cœur sur un fil à 35 mètres du sol. À Rennes, ce samedi 8 juillet, la funambule était devant des milliers de personnes entre la chambre des métiers et la cité internationale Paul Ricœur.
Accompagnée par des musiciens et cinquante « cavalettistes » (sorte d’assureurs), la jeune femme a parcouru 220 m de long, à plus de 20 m de haut, sur un câble de 2 cm de diamètre ! Par deux, elle a multiplié la peur des spectateurs. Par deux, elle a emballé le cœur des Rennais et des Rennaises. Sans conteste, elle a enchanté petits et grands par ses prouesses, le long de son balancier de plus de 7 mètres.
À mi-chemin, devant la Sécu, Tatiana a créé quelques frayeurs aux Bretons bien accrochés à la terre ferme. Elle a entamé des acrobaties à faire pâlir tout sujet aux vertiges. Elle s’est enroulée le long du câble, s’est lovée autour de son balancier comme le ferait le plus habile des lémuriens, le long de lianes d’une forêt exotique de Madagascar. À cet instant, le temps suspendait son vol. Tatiana était étincelante, éblouissante et émouvante.
Entre crainte et performance de haut vol, le cœur des Rennais s’emballait au gré des pas chaloupés et chassés de Tatiana. Elle trompait la mort dans le soleil du soir. Elle était entre attraction terrestre et voûte céleste. Devant cette toile animée que Toulouse-Lautrec aurait aimé peindre, on s’enflammait avec l’écrivain Gabriel Cécile. « Son corps filiforme, comme une corde tendue, était enfiévré par une confiance infinie, défiant les lois de la gravité », écrivait-il jadis dans Le Funambule.
Devant les yeux ébahis, écarquillés, la silhouette de Tatiana était un oiseau fragile dans l’horizon de coton. Elle était grâce comme un tableau de Degas. Mais rien ne pouvait empêcher sa progression vers le toit de la cité internationale. Tatiana, détendue, narguait l’apesanteur sur un fil au milieu des applaudissements libérateurs. Par de petits déhanchés, elle rejoignait enfin le sommet de son parcours, loin de nos peurs. Assurément, elle méritait les vivats, l’éblouissement des regards. Au-delà des limites, cet artiste de l’éphémère nous a octroyé l’une des plus belles offrandes esthétiques.