Elle s’appelait Raymonde Tillon-Nédelec. Elle avait 100 ans. Décédée le 17 juillet 2016, elle a reçu les honneurs de la République. « Je salue le parcours exemplaire de cette femme engagée et présente ses condoléances à sa famille et à ses proches, » a commenté notre président, François Hollande. Engagée très jeune dans l’action syndicale et politique, elle fut députée communiste des Bouches-du-Rhône de 1945 à 1951. « Elle était la dernière survivante des 33 femmes élues à la première Assemblée Constituante de la 4ème République, » a ajouté le président.
Née le 22 octobre 1915 à Puteaux (Hauts-de-Seine), Raymonde Tillon était attachée à Rennes. Elle avait épousé en secondes noces Charles Tillon, dirigeant communiste, ministre et Rennais lui-même. Son époux, fils d’une cafetière de la place des Lices, avait en effet étudié à l’école primaire de la rue d’Echange puis à l’École d’Industrie du boulevard Laënnec. Une avenue et un lycée professionnel portent même aujourd’hui son nom.
Entrée tôt dans la Résistance, Raymonde fut arrêtée le 31 mars 1941. « Elle a été condamnée à vingt ans de travaux forcés par le tribunal maritime de Toulon, » explique son biographe officiel sur le site de l’Assemblée Nationale. « Emprisonnée tour à tour à Marseille, Toulon et Lyon, elle fut livrée aux Allemands en juin 1944 et déportée d’abord à Sarrebruck puis au camp de Ravensbrück. Affectée dans une usine de guerre de Leipzig, elle parvint à s’évader le 20 avril 1945 et à regagner Marseille. »
Députée des Bouches du Rhône, elle proposa des lois en faveur des enfants adultérins et des veuves de guerre lors de ses premiers mandats. Son activité fut toutefois plus soutenue lors de la troisième législation. « Elle déposa de nombreux rapports ou propositions de loi sur des questions relevant parfois des intérêts de son département, plus fréquemment en faveur des personnes âgées, des veuves ou des vieillards. »
En 1951, la candidature de Raymonde Nédelec ne fut pas retenue par le parti communiste. « Tout laisse à penser cependant que cette omission est intimement liée à la disgrâce toute proche de Charles Tillon dont elle est devenue l’épouse cette même année. » Le 1er septembre 1952, Charles Tillon fut en effet exclu du Bureau politique puis écarté de toute responsabilité. « Comme lui, elle fut exclue du parti le 3 juillet 1970 après leur ferme condamnation de l’intervention soviétique en Tchécoslovaquie et de la politique de normalisation qui s’ensuivit. »
Le couple, qui a eu deux enfants s’ajoutant aux deux fils de Charles, lui aussi veuf, s’est retiré d’abord à Montjustin, dans les Basses-Alpes, puis à La Bouëxière près de Rennes avant de repartir pour Marseille où Charles Tillon décède le 13 janvier 1993. Revenue à Rennes, Raymonde Nédelec avait rappelé en 2005, dans une interview à l’AFP, son émotion lors de son élection 60 ans auparavant. « Nous étions émues. Les femmes étaient reconnues comme des citoyennes, en tenant compte de leur travail dans la Résistance », s’était-elle félicitée. « Nous étions de partis différents. Mais toutes nous nous disions : enfin ! ». Raymonde Tillon-Nédellec a publié, en 2002, J’écris ton nom, Liberté, sorte de récit autobiographique. D’où le tweet de notre maire, Nathalie Appéré : Liberté, durant toute sa vie Raymonde Tillon écrivit ton nom. Elle nous a quittés mais nous garderons son inlassable appel à résister. » Raymonde Tillon sera inhumée au cimetière de l’Est, à Rennes.