À Rennes, les graffeurs ont la main alerte et le talent à fleur de bombe – et pas celle des fanatiques islamistes. Sur la palissade de l’îlot Saint-Michel, dans le centre-ville, quelques jours après l’attentat de Charlie Hebdo en janvier 2015, ils ont graffé leur chagrin, leur désarroi, leur révolte. En quelques heures seulement, les tristes planches de bois et de métal des chantiers se sont métamorphosées en planches à ciel ouvert. Ce fut une galerie éphémère pour une douleur collective, une colère partagée.
Scandalisés par l’horreur, les artistes de rue ont voulu marquer leur solidarité envers leurs glorieux aînés. À coups de slogans percutants, ils ont utilisé leur art comme une arme contre la barbarie. Dans le centre-ville, leurs bombes de peinture ont fait trembler les terroristes. Sans complexe, ils ont dessiné, tagué pour transformer les larmes en éclats d’humour, pour faire briller l’esprit mordant de Cabu, Wolinski, Charb et les autres.
Fils spirituels de la bande à Charlie, nos graffeurs étaient dans la rue pour Cabu. Ils étaient sous les nuages pour Wolinski, Ils étaient là pour Bernard Maris. Ce jour-là, la ville s’est parée de couleurs. Ce jour-là, les streetartistes rendaient hommage à ceux qui avaient payé de leur vie le prix de leur impertinence.