Charles Compagnon et Nicolas Boucher, conseillers municipaux de l’opposition (centre droit), ont vécu l’horreur, lors de la fusillade du 17 avril dernier. Avec des clients du Subway, ils ont vu la mort de près. Ce 22 avril, ils sont de retour sur les lieux. Tous deux, à la même table et aux mêmes places, ils sont entourés de la ministre de la ville, Juliette Méadel, et d’un aréopage d’élus de la majorité. Eux sont assis, les autres debout. Un fossé les sépare. Mais tous deux ont besoin de raconter l’arrivée des tireurs, ayant blessé quatre personnes.
J’étais focalisé sur l’arme. », CHARLES COMPAGNON.
« Nicolas m’a tiré par le col », explique Charles Compagnon, les traits tirés. « Juste avant, ajoute Nicolas Boucher, une jeune fille a dit à sa mère : maman, couche-toi. Dès que j’ai entendu ces mots, j’ai plaqué au sol, Charles. Une fois par terre, on a vu les victimes s’affaisser toutes les trois. Regardez là, il y a encore les impacts de balle dans le mobilier. »
Encore une fois, Charles Compagnon a besoin de témoigner devant la ministre. « J’ai eu peur, après. J’ai eu la crainte qu’ils viennent finir le travail ! L’une des victimes était très calme, les deux autres étaient en panique. Non loin, un père de famille était prostré. Il protégeait sa fille de son corps. Nous avons caché les blessés, à l’arrière du restaurant. Nicolas et une jeune femme ont fait un garrot . Tout le monde était en sidération.»
Si j’avais pu m’enfoncer dans le sol, je l’aurais fait ! », Charles Compagnon.
Encore une fois, Nicolas Boucher se souvient des sons. « On a entendu : poum, poum et poum. On se disait : celle-là n’est pas pour moi ! », précise-t-il. « On a cru que nous allions en prendre une. Moi, j’étais plus fataliste que Nicolas», convient Charles Compagnon. En écoutant, la ministre replonge dans un passé pas si lointain. « Ce que vous me racontez, c’est ce que m’ont confié les rescapés des attentats. Tous disent la même chose : on se sent ciblé, on pense qu’on va mourir. C’est ce qu’on appelle l’angoisse de mort imminente. »
Par un silence, Charles Compagnon semble acquiescer. « Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi je n’ai pas bougé. » Devant de tels propos, la ministre ne peut pas s’empêcher de déclarer devant les caméras. « En tout cas, vous avez été courageux tous deux ! » Après la visite officielle, la représentante du Gouvernement est repartie pour une visite du quartier de Maurepas avec la maire, Nathalie Appéré. Dans le restaurant d’en face, Charles Compagnon et Nicolas Boucher se sont retrouvés tous les deux, seuls, devant un café. « Il y a quelque chose qui nous lie, d’indéfectible », assurait Charles Compagnon. « Nous sommes reconnaissants à la ministre d’avoir pris le temps de nous écouter. Pour nous, dans le travail de notre reconstruction, cette visite est réparatrice. »