Bonté divine ! Les deux plus petits cimetières rennais sont religieux. Le premier est situé à deux pas du parc Saint-Cyr et de la MJC de la Paillette. Ici, pas de porte fermée à double tour, ni même de laissez-passer à demander pour pénétrer dans notre insolite endroit. Il suffit de pousser une barrière blanche légèrement grinçante… ou encore de sauter par-dessus d’une manière élégante à la manière de Roger Moore dans Amicalement vôtre.
Une fois à l’intérieur, des croix et encore des croix alignées en deux rangées l’une en face de l’autre. Sous chacune d’elles, des religieuses de la congrégation Notre-Dame de la Charité reposent en paix. Elles portent des prénoms que les fans des prénoms désuets mettraient sans doute au pinacle. Pour notre part, on aime beaucoup, Marie-Angélique, plus de ce monde depuis 1947.
Au fond du petit cimetière, s’élève encore une grande croix avec des inscriptions en l’hommage des sœurs et du prêtre de leur communauté. Heureux homme que ce Joseph Massot (1881-1961), seul parmi toutes ces dames ! De son temps, il était sans doute leur confident, glanant ici où là des secrets inavouables ou bien leur doute existentiel.
Mais que font-elles là, toutes ces dames ? Jadis, elles logeaient dans leur couvent, non loin de là, où elles recueillaient des femmes de peu de vertu et des orphelines. Parfois, elles se retrouvaient à la buanderie où elles nettoyaient le linge des garnisons militaires et de tout Rennes. Un dur labeur qui méritait amplement le repos éternel dans un coin de verdure.
Ce cimetière est tout rikiki et charmant. À tort, beaucoup le considéraient comme le plus intime. Mais que nenni ! Rue de Paris, en direction de Cesson, la communauté des Petites sœurs des Pauvres cache la dernière demeure de quelques religieuses (notre photo d’une). Il y a là sœur Saint-Aaron (décédée le 23 décembre 1871 à l’âge de 26 ans) et toutes ses copines qui dorment à l’abri d’un grand mur de schiste et sous des croix immaculées.
Ici, les sépultures sont toutes simples avec enclos en bois, des plaques en émail et cailloux blancs. Ici, un petit banc en pierre invite à prier pour ces religieuses qui, on se plaît à le penser, ont sans doute connu leur bienfaitrice, Sainte Jeanne Jugan. Pour rappel, la célèbre cancalaise (née le 25 octobre 1792) est morte à Saint-Pern le 29 août 1879, soit quelques années après de sœur Saint-Aaron. Humble fille du peuple, simple servante, émue de pitié à la vue des vieillards qui décédaient dans l’abandon, elle fonda à Saint-Servan un institut qui, depuis, n’a cessé de prospérer. Elle a été béatifiée en 1982.