Ce dimanche 20 août 2023, vers 13 heures, les médecins du SAMU interviennent à Guipry-Messac, au sud de Rennes. Ils portent assistance à une octogénaire, sérieusement atteinte au cou et aux bras. Devant la gravité de la blessure et la perte de sang abondante, ils affrètent un hélicoptère pour conduire au plus vite la victime au CHU de la capitale bretonne. Elle sera opérée dans les meilleurs délais. Mais ses jours ne sont plus en danger.
À l’arrivée peu après des gendarmes sur les lieux, le voisin, qui a prévenu les secours, est formel. Il a reçu les confidences de la dame d’un certain âge. « Un individu d’origine maghrébine, munie d’une cagoule et d’un survêtement, l’aurait sauvagement agressée », affirme-t-il aux enquêteurs. «Il lui aurait porté des coups de couteau au bras. Il se serait assis sur ses genoux en la frappant à la gorge. L’agresseur aurait crié : Allahu Akbar. »
Marteau contre couteau à fromage
Rapidement, les gendarmes et les proches de la victime ont des doutes sur cette version. Lors de l’intervention des ambulanciers, le voisin est apparu agressif et tient un discours « étrange ». Au regard de ses comportements, les militaires de la brigade de recherche de Redon multiplient les investigations et les recoupements dans les jours suivants. Le 22 août, ils entendent l’octogénaire sur son lit d’hôpital. « Au moment du déjeuner, un homme encagoulé et ganté a surgi avec des lunettes de soleil. J’ai été agressée violemment et volée d’une somme de 450 € », confirme-t-elle.
Avec l’aide d’un marteau, la dame a tenté de se défendre contre son agresseur muni d’un couteau à fromage. « J’ai eu très peur. Du sang coulait de mon cou. Il essayait de m’étouffer. C’est un miracle que je sois encore vivante. » Sans hésiter, l’octogénaire soupçonne ses voisins. Mais lors de sa garde à vue, l’intéressé nie les faits et adopte une attitude odieuse envers les enquêteurs. À plusieurs reprises, il tient des propos misogynes à l’égard d’une gendarme. « Vous savez, madame, je dispose d’un quotient intellectuel de 140. Je suis le cousin de Nathalie Kosciusko-Morizet et le descendant de Freud et Corneille », précise-t-il, avant d’ajouter « ne pas pouvoir blairer les « bougnoules. »
«Je suis le cousin de Nathalie Kosciusko-Morizet », confie l’homme.
Contre toute attente, la femme du mystérieux voisin va participer au dénouement de l’enquête… Lors des investigations, elle avoue aux fins limiers avoir vu son mari partir avec un couteau et revenir avec de l’argent. Plus grave encore, l’agresseur aurait confié à son épouse vouloir passer à l’acte deux jours auparavant, qualifiant aux yeux de la justice une préméditation des faits.
À l’audience, l’homme de 70 ans se plaint toutes les dix minutes. Il ose reprocher à la victime son caractère « coriace » en se débattant, se contredit sans cesse et avec aplomb devant les juges dit être raciste. Après une heure de procès, sous l’œil médusé des magistrats, le retraité s’octroie même une petite pause et demande à son avocate de revenir avec une boisson !
Toutefois, l’assistance n’en a pas fini avec la nature surprenante du prévenu. Au moment de la description de sa personnalité, l’agresseur se met à pleurer. « Ma mère m’a frappé de mes 8 ans jusqu’à ses 20 ans. Elle me faisait manger mes excréments et a tué 4 nouveau-nés (…). Je suis devenu raciste après la mort de mon frère égorgé par des Africains en région parisienne en 2005 », ose le retraité, ancien coiffeur.
En revenant sur les faits, l’ex-commerçant a du mal à s’expliquer. « Je ne sais pas pourquoi j’ai agi ainsi », assure-t-il. « Je n’ai rien du tout prémédité. Je suis passé à l’acte, car j’étais sous l’emprise des médicaments. Dans ma famille, m’appelle le loup-garou. Quand j’en prends, je fais n’importe quoi. »
Quel regard portez-vous sur cette affaire aujourd’hui ? » lui demande la présidente. « Je suis un connard, c’est tout » souffle l’homme.
En face de lui, l’avocate de la partie civile Salomé Bourgeois regrette « son positionnement et son attitude ». « C’est une nouvelle violence pour ma cliente, toujours hospitalisée et qui ne peut être à l’audience. » Devant lui, la défenseuse rappelle la vulnérabilité de la victime. « Les conséquences auraient pu être plus graves. Nous n’étions pas loin de la cour d’assises. Cela s’est joué à pas grand-chose. Elle a cru mourir ! »
De l’autre côté de la barre, la procureure de la République insiste sur la préméditation lors de ses réquisitions. « Il n’a pas agi sur un « coup de folie » comme il le prétend », assène-t-elle. « Ce passage à l’acte est grave et odieux. Je requiers en conséquence à 6 ans d’emprisonnement à l’encontre de l’agresseur. » En fin de soirée, le tribunal a condamné Marc Dobrovolny à la peine de 6 ans ferme.