Dans une longue robe grise (comme le temps) et scintillante, ce 6 janvier, la pianiste Vanessa Wagner arrive sur la scène de l’opéra. Elle salue les musiciens de l’Orchestre national de Bretagne, la chef d’orchestre Lucie Leguay et le public. Devant elle, son piano ! Elle s’y assied, ajuste son siège, allume son pupitre digital et commence son récital. Bien vite, ses mains filent le long des touches noires et blanches, s’arrêtant parfois le temps d’une escale silencieuse. Dans la salle, émotions et vertiges. Dans la salle, larmes et yeux fermés pour apprécier le concerto pour Clavier numéro 5 en Fa en BWV 1056 de Jean-Sébastien Bach, Danses concertantes d’Igor Stravinsky et Tirol, concerto pour piano de Philip Glass. Durant une heure, la virtuose rennaise régale son public sur la scène rennaise. Elle joue tout en douceur et en force, tout en grâce et en élégance. Ses gestes accompagnent son talent. Ils sont ceux d’une musicienne inspirée et inspirante. Loin des pianistes endimanchés dans des costumes étriqués, Vanessa Wagner interprète ses partitions comme un tableau de Degas, comme une œuvre de Balthus. Parfois, elle s’envole dans un éclair de génie, dans une fulgurance esthétique, dans une sorte de révolte intérieure. Femme instrumentiste, elle joue dans un tempo gracieux et dans une retenue brillante. Face à elle, le public se défend de tousser pour aimer sa « carte blanche » enjouée et mélancolique. « C’est une vraie émotion », affirme l’interprète à la fin de sa prestation. « C’est ici à l’opéra que j’ai écouté mes premiers concerts à 12 ans. Retrouver mes racines me font plus que plaisir. » Dans le parterre, on contient son souffle, espérant le retour de la virtuose. Elle reviendra deux fois pour jouer des études de Philip Glass. Magique.