En novembre 1934, un parricide devant la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine ! « Cela explique la grande foule, qui, bien avant l’heure de l’audience, assiège les portes du palais », écrit le journaliste du quotidien Ouest-Eclair, Jehan Tholomé, le 29 novembre. Dans le box des accusés, le Rennais Jean Dugré est un jeune homme de 22 ans, au visage « tourmenté et durablement marqué par les stigmates » de l’alcoolisme et de la tuberculose. « On a peine à croire que ce garçon ait eu la force nécessaire pour porter un seul coup qui devait être fatal à sa mère. »
Ce 25 juin 1934, Jean Dugré devait se rendre à la maison d’arrêt pour purger une peine pour coups et blessures. Mais avant cela, il exige que sa mère, Victorine, une blanchisseuse de 52 ans, l’accompagne. Dans un accès de colère, il lui assène un violent coup au niveau du sein gauche. La malheureuse s’effondre. Malgré l’intervention des secours, elle succombe à ses blessures.
Devant la cour d’assises, quelques mois après le drame, le jeune homme tente de justifier son acte. « Croyez que je n’ai pas voulu cela. Je regrette de l’avoir frappée… Je l’aimais bien », balbutie-t-il, les yeux baissés. Présenté comme ivrogne (du pernod au petit-déjeuner), le manoeuvre échappe toutefois à la peine capitale. « Nous ne sommes pas des pourvoyeurs de la guillotine », indique le substitut général Picard. « Nous voulons la simple justice. »
De l’autre côté de la barre, maître Noël, avocat de la défense, dresse le portrait d’un jeune homme brisé par une enfance malheureuse et les mauvais exemples qui l’ont entouré. « Dans un coup de colère, il a frappé maladroitement et il a tué. Mais qu’a-t-il fait lorsqu’il s’est rendu compte de son acte, il a cherché à la sauver. Et il alla sonner en vain à la porte de trois médecins. » Malgré cet appel à la clémence, le jury tranche : Jean Dugré est condamné à dix ans de réclusion criminelle. À l’annonce du verdict, il s’effondre en larmes dans son box.