Marcelle et Alain aiment les voyages. Ils ont fait en side-car l’Amérique du Sud, à vélo Rennes-Dakar et en voiture Paris-Hanoï. Mais au-dessus de leur tête, dans leur maison de la rue Lobineau (quartier Sacré-Coeur), ils n’auraient jamais imaginé trouver un vieux pigeonnier dans leur grenier. « Notre envie de voyager vient peut-être des pigeons voyageurs qui nichaient sous notre charpente », s’amuse Alain.
En revanche, impossible de savoir l’origine du colombier ! « Nous habitons non loin de la caserne Margueritte, peut-être que notre maison abritait un militaire colombophile, explique Alain. Rien n’est certain. « J’ose imaginer la présence d’un résistant en 1940, » ose un riverain. « Quand on voit les Croix de Lorraine, on peut aisément l’imaginer. Il était peut-être le messager de la résistance rennaise… »
Le mystère demeure dans le quartier. Pour rappel, dès la guerre franco-prussienne de 1870 et le siège de Paris, les pigeons sont le seul moyen de communiquer avec la capitale. Après ce conflit, des régiments militaires vont se lancer dans la colombophilie. « Pendant la Première Guerre mondiale, près de 30 000 pigeons sont ainsi utilisés pour pallier aux interruptions intempestives des liaisons téléphoniques », note le site du ministère de La Défense.
Durant la Seconde Guerre Mondiale, les allemands ont interdit l’usage des volailles. « Ils avaient condamné l’usage des postes radio sur le territoire français et ils ne voulaient pas que les pigeons puissent les remplacer », souligne Yvon Bouquillon. Contre cette décision, les britanniques ont parachuté 16 500 pigeons-voyageurs de Londres en France pour permettre aux résistants français de fournir des informations au Royaume-Uni. « Ils avaient une double mission : la communication et le renseignement, précise le caporal Guer. Des appareils photo au déclenchement automatique étaient attachés aux pigeons qui rapportaient des clichés des positions ennemies. »
Un pigeon célèbre ! « En 1916, le commandant Raynal, subissant la pression allemande au fort de Vaux, envoie son dernier pigeon avec un message de détresse, raconte Yvon Bouquillon, conservateur honoraire du musée des transmissions du Mont-Valérien. Ce pigeon, appelé le Vaillant, était son ultime espoir. Volant dans la fumée et la mitraille, il a réussi à atteindre son colombier, diffusant donc son message et sauvant de cette manière une centaine d’hommes. » L’armée a décerné au pigeon la Croix de guerre qui a fait l’objet d’un film d’animation, « Vaillant, pigeon de combat », en 2005.