L’idée était séduisante : implanter un musée des beaux-arts au cœur du quartier populaire de Maurepas, au pied d’un immeuble de logements sociaux, pour rendre la culture accessible à tous. Ce nouveau site, inauguré le 1er février 2025 en grande pompe, s’inscrit dans un projet de rénovation urbaine d’envergure. Offrant une entrée gratuite et misant sur la participation des habitants, il se veut un modèle d’ouverture et d’inclusion, dixit la municipalité rennaise. Il visera à rapprocher l’art de ceux qui en sont souvent les plus éloignés. Mais une fois sur les lieux, l’enthousiasme laisse place à quelques interrogations. Le résultat est-il à la hauteur des attentes ?
Une façade façon cul de bouteille !
Dès l’approche du bâtiment discret à l’architecture minimaliste, le manque de visibilité saute aux yeux. Pas de grande façade annonçant la présence d’un musée, juste une petite entrée au rez-de-chaussée d’un immeuble des années 60 (La Banane), où il faut presque chercher la porte. « À deux pas, la station de métro a plus d’allure », assure un visiteur. « On est bien loin du Conservatoire du Blosne, dernière construction imposante de nos quartiers. »
Une fois à l’intérieur, l’espace est restreint, la scénographie minimaliste, et l’on peine à retrouver l’atmosphère d’un véritable musée. Loin des vastes galeries du site historique du quai Émile-Zola, ici tout semble plus fonctionnel, presque temporaire. « On a l’impression d’être dans une MJC », ajoute le même visiteur. Le rez-de-chaussée peine à trouver une identité claire. Les œuvres qui sont présentées, plus qu’éclectiques, ne sont pas les pièces majeures des collections des Beaux-Arts, ce qui renforce le sentiment d’un projet sous-dimensionné. Mais que l’on se rassure, l’étage relève un peu le niveau. La première exposition, Fantaisies, imaginée par l’artiste Isabelle Arthuis, parvient à instaurer un dialogue intéressant entre les visiteurs (pas du tout du quartier) et l’artiste. « Ce cabinet de curiosités vaut le détour », convient un passant.
Le jour de notre visite, l’impression d’être aux côtés des CSP+ — curieux de découvrir un autre lieu rennais — prédominait largement.
Au cœur du projet, l’implication des riverains pourrait permettre au musée de trouver sa place dans la vie de Maurepas, à condition que l’intérêt et l’engagement du public suivent. Car au-delà des intentions louables, une question demeure : ce musée réussira-t-il à attirer suffisamment de visiteurs ? Ne sera-t-il pas un lieu déserté, uniquement fréquenté lors des événements officiels ? Le coût, qui s’élève à 2,5 millions d’euros, interroge également. Avec un espace limité, une collection permanente absente et une visibilité faible, on peut légitimement se demander si cet investissement était réellement justifié. Car si le projet se veut innovant, on ne peut s’empêcher de se demander s’il ne s’agit pas d’un miroir aux alouettes ; d’un programme davantage porté par des considérations politiques que par une réelle nécessité muséale.
L’idée de rapprocher l’art des habitants est précieuse, mais encore faut-il que le projet suscite une adhésion durable. Pour l’instant, ce musée ressemble bien plus à une galerie d’expérimentation qu’à un véritable lieu patrimonial. Si l’ouverture d’un espace d’art dans un quartier populaire est une initiative qui mérite d’être saluée, sa réussite dépendra de sa capacité à proposer une programmation forte grâce à des animatrices visiblement dévouées. Seul l’avenir dira si cette initiative parviendra à s’ancrer durablement dans le paysage culturel rennais ou si elle restera un projet bien intentionné, mais peu impactant. En attendant, la visite vaut le détour… mais sans doute pas un grand détour. Deux expositions y seront prévues chaque année.
