Une vaste opération judiciaire, menée sous l’égide de la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Rennes, a permis de mettre fin à un important trafic de stupéfiants reliant l’Espagne à la France. Quinze personnes ont été interpellées et 151 kilos de drogue ont été saisis, représentant une valeur marchande estimée à 2,5 millions d’euros.
Une enquête de longue haleine
Tout commence le 7 mai 2024, lorsque le parquet de Lorient confie une enquête préliminaire à la section de Recherches de Rennes. Rapidement, les investigations révèlent un trafic de stupéfiants bien organisé, avec une base logistique en Espagne destinée à approvisionner la Bretagne. Face à l’ampleur du réseau et à son caractère international, la JIRS de Rennes ouvre une information judiciaire le 25 juin 2024.
Bien vite, l’enquête met en lumière une organisation criminelle particulièrement structurée et méthodique. « Les trafiquants faisaient transiter la drogue par Malaga en multipliant les trajets, avec un véhicule “ouvreur” et des véhicules “porteurs”. Équipés de caches aménagées, ils prenaient de nombreuses précautions pour sécuriser les livraisons », explique le procureur de la République, Frédéric Teillet. Toujours selon le magistrat, le réseau utilisait une maison isolée dans le sud de l’Espagne pour conditionner la drogue avant son acheminement vers la France.
Le 28 janvier 2025, l’opération judiciaire est déclenchée sous la supervision du magistrat instructeur de la JIRS de Rennes. Un convoi de stupéfiants est intercepté dès son arrivée dans une maison d’habitation servant de plateforme de distribution, située dans le Morbihan. Ce jour-là, le Groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN) intervient et interpelle trois conducteurs ainsi que le responsable du réseau en Bretagne, venu superviser la réception des produits.
Parallèlement, une série d’arrestations est menée simultanément grâce à la coordination entre les autorités françaises et espagnoles. En France, quatre semi-grossistes, trois conjointes de trafiquants et un chauffeur sont interpellés. En Espagne, la tête du réseau ainsi qu’un de ses proches associés, tous deux, originaires du Morbihan, sont arrêtés en présence d’enquêteurs français. « Les deux Français, interpellés par les autorités espagnoles, ont depuis fait l’objet d’un mandat d’arrêt européen. Ils devraient être remis dans les prochaines semaines à la justice française », précise le procureur, Frédéric Teillet.
Cette opération aboutit à la saisie d’une quantité impressionnante de drogues et de biens. En France, les enquêteurs découvrent 111 kilos de résine de cannabis, 14 kilos de cocaïne, 3,4 kilos d’herbe de cannabis, 6 kilos de drogues de synthèse. Pas seulement, ils saisissent 30 kilos de produits de coupe, plus de 37 000 euros en espèces, 16 véhicules ainsi que plusieurs armes et munitions.
En Espagne, les perquisitions menées sur neuf sites permettent de démanteler trois laboratoires de cocaïne et neuf chambres de culture de marijuana. Les forces de l’ordre saisissent dans le même temps 14 kilos d’herbe de cannabis, près d’un kilo de résine de cannabis, 2 kilos de cocaïne, 210 000 euros en numéraire ainsi qu’un important matériel de conditionnement et de transformation de stupéfiants.
En France, 13 individus ont été placés en garde à vue et présentés au magistrat instructeur de la JIRS. Neuf ont été placés en détention provisoire et quatre sous contrôle judiciaire. Les membres actifs du réseau et leurs revendeurs présentaient des casiers judiciaires vierges ou n’avaient été condamnés que pour des délits mineurs. Pourtant, les chefs d’accusation sont lourds. Ceux impliqués dans l’importation et le blanchiment des fonds issus du trafic de stupéfiants en bande organisée risquent jusqu’à 30 ans de réclusion criminelle, tandis que les revendeurs locaux encourent 10 ans de prison. Une confiscation générale du patrimoine est également envisagée pour tous les suspects.
« Cette opération témoigne de l’efficacité de la coopération européenne dans la lutte contre le trafic de stupéfiants et de l’engagement des autorités à éradiquer ce fléau », conclut le procureur de la République. Avec plus de 155 forces de l’ordre mobilisées, entre gendarmes français, policiers espagnols et experts de la coopération judiciaire, ce coup de filet marque une étape clé dans la lutte contre le narcotrafic entre la France et l’Espagne.