Il y a encore quelques années, la place de la gare était malfamée. Sa réputation laissait à désirer. Les Rennais déposaient leurs amis et leurs proches devant la station ferroviaire et repartaient tant bien que mal vers leur petit chez-soi. Peu fréquentaient les bistrots de l’endroit. Mais depuis quelques années, depuis les travaux entrepris par Rennes Métropole, l’adresse est tendance. Ses terrasses (bien exposées) trouvent une clientèle et les immeubles hôteliers sont rénovés à grands frais. « On retrouve peu à peu les fastes d’antan, la grande époque de l’hôtel Duguesclin », explique un vieux Rennais. « Dans les années trente jusqu’au début des années 70, c’était une place vivante où les habitants n’avaient pas peur de s’y rendre. Une clientèle de passage et de Rennais en partance vers des lieux de villégiature lointains fréquentait le buffet de la gare. »
Cela devient tendance !
Pour l’œil éclairé, le « changement actuel » s’observe par de nouvelles vitrines, des espaces de détente, une circulation apaisée, des bâtiments design… « À l’image de Lille et de son quartier EuroLille, Rennes renoue avec sa gare, » explique un urbaniste. « La place respire à la différence de Paris où les abords ferroviaires sont aujourd’hui mal pensés. Seul bémol : le vert est aux abonnés absents. Il n’y a pas un seul arbre à la ronde ! », regrette un riverain. « Heureusement, on a sauvé ceux de l’avenue Janvier contre la folie destructrice. »
Bien sûr, les automobilistes pesteront contre le manque d’accès, les chauffeurs de taxi relégués à une portion congrue trouveront à redire. Mais l’endroit commence à séduire. Il devrait même connaître une embellie, eu égard aux prochaines constructions, le long de la voie ferroviaire (120 000 m2 de bureaux, 60 000 m2 de logements et 5 000 m2 de commerces). « Beaucoup de restaurateurs ne s’y sont d’ailleurs pas trompés en s’installant sur l’avenue Janvier et le boulevard Beaumont. C’est un quartier qui se crée qui se dessine. »
Cette place offre désormais une magnifique perspective vers le Palais Saint-Georges. Elle invite à découvrir et à redécouvrir Rennes. Mais de plus en plus, elle se métamorphose en un lieu de promenade, voire gourmand. Dans la gare, une adresse culinaire gastronomique, le Paris-Brest, propose un menu de qualité, bien loin de buffets de jadis. Lancé par un grand nom de la cuisine (Christian Le Squer), ce restaurant montre ô combien cette place devient un must. Rennes a eu quelque part la bonne idée de conserver sa halte ferroviaire dans le cœur de sa ville.
Un peu d’histoire : En 1857, les Rennais inaugurent leur chemin de fer. À l’occasion de son arrivée, une importante fête est organisée avec la reconstitution de l’entrée de Jean V de Bretagne à Rennes, un défilé de chars des corporations, des bals et des banquets. Par sa construction, la gare permet d’imaginer de nouveaux logements et activités économiques (comme aujourd’hui !). Durant de longues années, elle poursuit son petit bonhomme de chemin jusqu’à la Seconde Guerre mondiale où un bombardement en mars 1943 fit 274 morts et 172 blessés. En 1992, une gare de Rennes plus innovante est conçue par l’architecte Thierry Le Berre, à l’occasion de l’arrivée du TGV atlantique. Depuis, les Rennais en ont connu une troisième, édifiée par l’agence rennaise de l’entreprise générale Léon Grosse. Elle est agrémentée d’une sculpture monumentale créée par l’artiste breton Jean-Marie Appriou.