Jadis, Cesson-Sévigné était perçue comme une ville dortoir. Depuis, elle est devenue très attractive, dynamique et accueillante. Beaucoup parlent d’un modèle à la Cessonnaise. Entretien avec Jean-Pierre Savignac, maire de Cesson (Horizons.
Cesson est souvent décrite comme une municipalité dynamique. Pourquoi selon vous ?
Jean-Pierre Savignac : la ville accueille entre 27 000 et 30 000 salariés quotidiennement, ce qui montre notre attractivité. Nous capturons 30 % de l’offre tertiaire de la métropole, en particulier à Atalante-Via Silva, mais aussi dans les zones de la Rigourdière et ZI sud-est. En peu de temps, notre commune a connu une croissance démographique significative, passant de 3 500 habitants en 1974 à près de 19 000 aujourd’hui. Nous veillons à une gestion maîtrisée de cette croissance. Il est essentiel de garantir l’intégration harmonieuse des nouvelles populations tout en protégeant la qualité de vie dans les zones résidentielles existantes et pavillonnaires. Ce n’est pas la peine d’aller trop vite. Je reste dans la filiation de mes prédécesseurs. Nos programmes sont menés à la Cessonnaise.
Un projet en particulier a suscité beaucoup d’attention : Via Silva. Où en êtes-vous ?
Jean-Pierre Savignac : Via Silva est un projet emblématique pour Cesson, que nous menons avec précaution. Nous avons presque terminé la première phase, validée en 2016-2017. Les immeubles sortent aujourd’hui de terre. Ce projet se déroule par étapes, avec un accent sur l’innovation et sans construire des quartiers immenses. Les prochains îlots, avec 100 logements chacun, incluront des constructions en terre crue et des matériaux biosourcés provenant de moins de 200 km autour du site. Nous avons également revu à la baisse l’ampleur initiale du projet pour mieux correspondre à notre commune. Via Silva passe de 650 hectares prévus par l’ancien maire à 205 hectares, avec un objectif de 10 000 nouveaux habitants, bien loin des 40 000 initialement envisagés. Beaucoup d’espaces seront agricoles et naturels.
Quelles sont les grandes entreprises qui se sont récemment installées à Cesson, et quelles sont les prochaines ?
Jean-Pierre Savignac : Plusieurs grandes entreprises ont choisi de s’installer ou de rester à Cesson. Une de nos pépites, créées à la pépinière de Cesson, restera ici malgré des offres d’autres régions et même des États-Unis. Son bâtiment commencera à être construit à partir du mois de septembre. C’est une belle réussite.
Le groupe Sopra Steria qui compte près de 1 000 salariés en Bretagne, dont 950 à Rennes, a emménagé en septembre 2023 dans de nouveaux locaux à Cesson-Sévigné, dans le nouveau quartier ViaSilva. Capgemini, qui compte presque 2000 salariés, a regroupé ses services, à Cesson.
Mais je ne peux oublier tout ce qui caractérisait autrefois notre dynamisme. Le centre-ville, avec ses 50 restaurateurs et toutes ses cellules commerciales occupées, témoigne de notre dynamisme. C’est assez exceptionnel pour une ville comme la nôtre au cœur de la métropole. De plus, des marques automobiles prestigieuses comme Mercedes et Renault s’installent dans notre zone industrielle Sud-Est. Ces installations sont la preuve que notre attractivité n’est pas uniquement tournée vers la technologie, mais aussi sur ce qui a fait notre histoire.
Comment décririez-vous la collaboration entre Cesson et la métropole de Rennes ?
Jean-Pierre Savignac : Nous ne sommes pas en opposition avec Rennes. Au contraire, nous travaillons en étroite collaboration pour le développement économique. Le dynamisme économique de Cesson fait partie de notre ADN et j’y contribue personnellement. Nous veillons à ce que les entreprises, grandes ou petites, se sentent bien dans leur environnement pour qu’elles y restent. En permanence, nous travaillons pour connaître les besoins des entreprises et l’environnement des salariés. Cela inclut des projets comme la création d’une halle gourmande de 1500 m² pour rendre Cesson attractive aussi bien pour les étudiants que pour les salariés. Cette approche nous permet d’accueillir et d’intégrer les nouvelles populations tout en préservant notre qualité de vie.
Cesson a longtemps été perçue comme une ville résidentielle. Est-ce toujours le cas aujourd’hui ?
Jean-Pierre Savignac : Cesson reste une commune où il fait bon vivre, mais elle est aussi une municipalité qui évolue, avec un tissu économique solide. Avec 2500 entreprises et un campus qui accueillera 2500 étudiants, nous devons adapter notre offre d’habitat, y compris pour les étudiants. Mon rôle de maire est de projeter notre ville dans le futur tout en maintenant ses emplois, son innovation et la qualité de son enseignement. Cela dit, nous n’oublions jamais l’histoire et notre ADN, qui attirent tant de nouveaux habitants chaque année.
Qu’en est-il de la culture ?
Pour la médiathèque et la saison culturelle, notamment, le budget dépasse 1 million d’euros. Et cela ne concerne que les charges salariales des agents municipaux qui travaillent dans le domaine culturel. Je ne parle même pas du coût de la saison elle-même, ni du matériel, ni des infrastructures nécessaires. Cela fait partie de l’ADN de notre ville, et notre programme, nos festivités en sont le reflet le plus visible. C’est ce qui nous permet de bénéficier d’une vitrine médiatique. Mais il ne faut pas oublier tout le travail accompli par les agents qui œuvrent dans les écoles d’art.
Parmi les infrastructures phares de Cesson, on peut citer la Glaz Arena et le stade d’eaux vives. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Jean-Pierre Savignac : La Glaz Arena est effectivement un projet marquant pour notre ville. C’est un complexe de 4 500 places, ce qui est exceptionnel pour une ville de notre taille. La construction s’est faite en partenariat avec le groupe Legendre, et la ville a veillé à ce que le montage privé soit accompagné de conditions favorables pour notre collectivité. Quant au stade d’eaux vives, bien qu’il ait coûté 4 millions d’euros, il a bénéficié d’aides de l’État et de la région. Ce qui a permis de le rénover sans surcoût par rapport à sa précédente structure. C’est une infrastructure majeure qui attire des visiteurs au-delà de notre commune.
Vous avez mentionné que la piscine vieillit. Quelles sont vos réflexions à ce sujet ?
Jean-Pierre Savignac : La piscine de Cesson est un sujet important pour l’avenir. Elle commence à montrer des signes de vieillissement, et nous devrons penser à son avenir. Plusieurs options sont sur la table : une rénovation complète, une nouvelle construction ou encore l’ajout d’un bassin extérieur. Ce projet est à envisager sur le long terme, car la demande pour des équipements de natation est forte dans la métropole, et notre piscine attire des usagers bien au-delà de Cesson.
Avec les nombreux projets et l’évolution rapide de Cesson, comment gérez-vous l’équilibre entre développement et qualité de vie ?
Jean-Pierre Savignac : L’équilibre entre développement et qualité de vie est au cœur de nos préoccupations. Il est crucial de respecter l’histoire de notre ville tout en répondant aux besoins des nouvelles populations. Nous protégeons le centre-ville et les quartiers historiques, tout en intégrant de manière harmonieuse les nouveaux arrivants. Nous travaillons aussi sur des projets qui apportent de la fraîcheur et du bien-être, comme le parc de 45 hectares au sein de Via Silva, ou encore les rues-jardins qui favorisent une circulation douce et agréable. Notre objectif est de ne jamais oublier d’où nous venons, de capitaliser l’œuvre entreprise dans le passé, tout en construisant un avenir qui respecte l’ADN de notre commune.
Vous parliez de l’image de Cesson comme une ville résidentielle, mais aussi comme une municipalité où l’on travaille. Comment parvenez-vous à réaffirmer cette dualité ?
Jean-Pierre Savignac : Cesson est une ville où la qualité de vie et le dynamisme économique vont de pair. Nous avons 2 500 entreprises sur notre territoire, allant des grandes sociétés technologiques aux petits commerces du centre-ville. Nous veillons à maintenir un équilibre entre ces deux aspects en nous assurant que les infrastructures, qu’elles soient culturelles, sportives ou commerciales, répondent aux besoins de tous. Par exemple, nous avons des projets pour attirer et loger les étudiants qui viendront dans notre futur campus, tout en continuant à soutenir nos commerçants et artisans. Cette dualité est essentielle pour maintenir Cesson comme une ville attractive et agréable à vivre.
Enfin, comment voyez-vous l’avenir de Cesson dans le contexte plus large de la métropole rennaise et au-delà ?
Jean-Pierre Savignac : L’avenir de Cesson doit être pensé en lien avec celui de l’agglomération rennaise, mais aussi dans une perspective d’aménagement du territoire plus large. Je pense que les métropoles comme Rennes concentrent trop de population et d’entreprises, au détriment des communes moyennes alentour. Nous devons travailler avec les communes voisines pour mieux répartir le développement économique et les services. Cesson continuera à évoluer, mais à son rythme, en prenant soin d’intégrer les nouvelles populations de manière harmonieuse. Notre ville est un exemple de développement équilibré, et c’est ainsi que je souhaite qu’elle continue à se développer dans les années à venir.
Infos + : Cesson enregistre le plus haut taux de licenciés sportifs de Bretagne avec 432 licenciés sportifs par 1000 habitants. Crédit photos : DR.
point de vue : La pieuvre rennaise
« Les métropoles concentrent aujourd’hui une grande partie de l’activité, que ce soit la population ou les entreprises, convient Jean-Pierre Savignac. Cependant, il semble qu’on ait quelque peu oublié l’aménagement du territoire tel qu’il était conçu autrefois. Prenons l’exemple de la Bretagne : Rennes est une ville importante, suivie de Saint-Malo. Mais il existe aussi des villes moyennes comme Fougères, Vitré, Redon, qui n’ont pas bénéficié de la même attractivité. Le phénomène métropolitain a fait oublier à certains la nécessité d’attirer les entreprises ailleurs. Il est crucial de repenser l’aménagement du territoire, notamment en ce qui concerne les infrastructures de transport. Cet aspect a été un peu négligé, ce qui a conduit à une concentration des ressources, mais aussi des difficultés. Lorsqu’une masse de population, qu’elle soit endémique ou exogène, se concentre trop rapidement dans une même zone, cela engendre des problèmes de gestion. C’est une réalité à laquelle nous faisons face. À Saint-Grégoire, Cesson, et d’autres communes similaires, nous avons choisi un développement plus progressif, permettant d’accueillir les nouvelles populations de manière plus inclusive. Ce n’est pas simple tous les jours et cela demande des investissements, notamment en matière de sécurité, mais cela nous permet de mieux intégrer ces nouvelles populations. C’est un enjeu qui dépasse largement le cadre de Rennes ou même de la métropole. Il s’agit de savoir comment aménager le territoire pour ne pas concentrer toutes les demandes et attentes sur un espace restreint. J’en suis convaincu : nous pouvons travailler en collaboration avec les communes et les agglomérations qui nous entourent pour mieux répartir les responsabilités. Nous n’aurons pas la solution, seuls. Mon véritable sujet, ce n’est pas de savoir si l’on vit mieux ou moins bien aujourd’hui à Rennes par rapport à hier. Ce qui m’importe, c’est Cesson, et la relation entre la métropole et Cesson, bien plus que la relation entre Rennes et ses propres statistiques. »