Dans la nuit du 24 au 25 avril 2024, une tonne de produits phytosanitaires a été dérobée dans une coopérative agricole du Calvados. Le préjudice, estimé à 93 000 euros, n’était que la partie émergée d’un vaste trafic organisé à l’échelle européenne. L’ampleur du phénomène a conduit à la création, dès le 2 septembre 2024, d’une cellule nationale d’enquête rassemblant la section de recherches de Caen, le groupement de gendarmerie du Calvados et l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI).
Très vite, les investigations ont été placées sous l’autorité du parquet de la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Rennes. L’information judiciaire ouverte en novembre 2024 a permis de relier au moins 80 faits à ce réseau, principalement dans le Grand Ouest, en Nouvelle-Aquitaine, dans le Centre-Val de Loire, mais aussi en région parisienne et dans la Marne. Le préjudice global s’élève à près de 3 millions d’euros.
Les faits sont qualifiés de vols en bande organisée, recel, association de malfaiteurs et blanchiment.
Les enquêteurs ont mis au jour un mode opératoire efficace et bien rodé : les produits dérobés étaient immédiatement expédiés vers la Roumanie, via un circuit de sociétés impliquées dans le recel. Le 24 juin 2025, une opération judiciaire de grande envergure a été menée simultanément en France et en Roumanie. Mandatée dans le cadre d’une commission rogatoire internationale, l’intervention a mobilisé plus de 200 policiers roumains, épaulés par des enquêteurs français sur le terrain. Dix personnes ont été interpellées en Roumanie, toutes soupçonnées d’implication dans les vols ou dans l’organisation du recel. Dans le même temps, une équipe de trois voleurs ont été interpellée sur le territoire national au retour d’un périple nocturne.
La coordination judiciaire entre la France et la Roumanie a été assurée par Eurojust, facilitant les échanges liés aux mandats d’arrêt européens et aux demandes d’enquête. Les perquisitions ont permis la saisie de plus de 180 000 € en numéraire, cinq véhicules et d’importantes quantités de produits phytosanitaires français sur plusieurs sites. « Neuf mandats d’arrêts européens ont été délivrés en vue de la remise aux autorités judiciaires françaises des individus interpellés en Roumanie. Sept d’entre eux sont en détention et deux sous contrôle judiciaire dans l’attente de la décision de la justice roumaine sur leur remise aux autorités judiciaires françaises. Les trois individus interpellés en France ont été présentés au magistrat instructeur les 26 et 27 juin 2025. Mis en examen, ils ont ensuite été placés en détention provisoire conformément aux réquisitions du parquet », indique Frédéric Teillet, producteur de la République.