Rennes Info Autrement vous propose, en partenariat avec lemagcinema.fr, un focus sur l’actualité cinématographique à Rennes.
Actuellement et jusqu’au 28 Janvier, au théâtre TNB, l’actrice Lyna Khoudri, popularisée par la qualité de son interprétation dans Papicha (mais aussi dans ses rôles précédents moins médiatisés), se voit confier la mission de relayer le pamphlet de l’auteur, metteur en scène, réalisateur et chorégraphe Pascal Rambert, qui fait parfaitement écho à l’actualité sociale en France.
Ainsi, dés son entrée sur scène, la jeune actrice se charge d’une énergie colérique bien nécessaire pour crier au public son désœuvrement face à l’avenir que le capitalisme lui promet, face au sort qui lui est réservé, face à sa réalité quotidienne, le lavage de vitres, en métaphore de la lutte des classes 2.0, de la misère ordinaire, mais aussi et surtout de la position particulière de celle qui observe un monde qui la laisse en dehors, en marge, qu’elle observe en toute transparence à travers une vitre, qui isole, interdit la communication, oblige au silence. L’auteur choisit des mots marquants, l’actrice les scande. Un dialogue virtuel s’installe entre les différents personnages conviés dans le monologue, mais aussi et surtout avec le public présent, à qui le « tu » peut finalement tout aussi bien s’adresser, dénonçant en cela la complicité de tous ceux qui laissent les choses se faire, ferment les yeux sur ce que le système met en place, se satisfont de la machine à broyer dés lors qu’elle les épargnent et leur laisse croire que leur docilité leur vaudra récompense. La jeune laveuse de vitre martèle qu’elle possède un BAC + 5, elle incante son père, sa mère, son amie vendeuse de magasin. Amour et haine ne font qu’un, la rage l’anime, quel intérêt à un monde qui se trompe dans ses valeurs ? Les répétitions s’accumulent pour que le message n’en soit que plus fort. Métro, boulot, caveau entendait-on dans les manifestations contre la réforme des retraites du jour. Métro, boulot, et regarder des séries dans un canapé avec un pyjama bob l’éponge, voilà l’anti-rêve, le contre modèle que dénoncent Rambert et son interprète. Pendant 45 minutes, le spectateur, bourgeois ou non (le théâtre doit choquer le bourgeois pensait Pasolini), assiste à une déferlante furieuse, et se confronte à des mots qu’il n’a pas nécessairement envie d’entendre, à des images que d’aucuns préfèrent ne pas voir, ne pas laisser voir.
La rencontre entre le metteur en scène et l’actrice fut une évidence. Pascal Rambert, invité à une soirée au théâtre de la Colline, fut touché par un texte personnel de Lyna Khoudri, évoquant ses parents et les années noires en Algérie. L’écho avec le projet Perdre son sac était déjà là. Un peu plus tard, au festival de Locarno, Rambert est de nouveau saisi par un discours cette fois-ci qui évoque son père, sa mère et le courage. Ils travaillent alors ensemble sur Actrice. L’évidence, une fois de plus, qui oblige Rambert à déclarer sa flamme: » Perdre son sac, je veux le faire avec toi, parce que ce sont les mêmes mots, demande de justice, révolte et amour qui vont et viennent dans le texte comme un souvenir du tien. »
