Thierry Pocquet du Haut-Jussé, nommé procureur général près la Cour d’appel de Rennes en septembre 2024, succède à Frédéric Benet-Chambellan. Lors d’une récente conférence de presse, il a présenté ses axes prioritaires à la tête des neuf parquets de Bretagne et Loire-Atlantique. Sans surprise, le haut magistrat a souligné l’urgence de la lutte contre le crime organisé, en invitant au renforcement des effectifs et des moyens de la justice. « Nous devons être à la hauteur de cet enjeu que nous pouvons percevoir maintenant dans toute sa réalité : le crime organisé a la capacité de déstabiliser notre société par sa violence et sa force financière », a-t-il martelé.
Contre l’argent sale, et plus généralement contre la corruption et l’économie souterraine, Thierry Pocquet du Haut-Jussé tient à être digne de ses prédécesseurs, comme le juge Van Ruymbeke (mort il y a quatre mois). « Si la juridiction de lutte contre la criminalité, la JUNALCO, a constitué une étape de cette adaptation, il faut aller plus loin. C’est désormais le sens de la réflexion actuelle de la chancellerie. L’hypothèse d’un parquet national spécialisé est envisagée, à l’instar de celui qui existe contre le terrorisme et contre la délinquance financière. »
Mais si l’action de la justice pénale doit être ferme contre la criminalité, elle doit aussi ne pas oublier la réinsertion de la personne condamnée. « La situation des prisons, ici en Bretagne comme dans la France entière, n’est pas satisfaisante, avec une suroccupation préoccupante. Nous devons trouver le chemin entre une prise en charge humaine et respectueuse, et la nécessaire sanction. »
Dans cette période qui n’est pas simple, la justice doit pour lui rester fidèle à sa mission. « Elle doit être à l’écoute du peuple français au nom duquel ses décisions sont rendues, mais sans sacrifier au respect du droit et sans chercher à plaire à tout prix. Elle doit être ouverte aux progrès et aux nouvelles technologies sans lesquelles elle se condamne à regarder passer les évolutions de notre société. Mais surtout, elle doit être capable de conserver les valeurs d’écoute et d’humanité qui fondent sa légitimité. »
Thierry Pocquet du Haut-Jussé est diplômé en droit de l’Université Paris-Sceaux en 1983, suivi d’une formation à l’Institut d’études judiciaires de Paris Panthéon. Il intègre l’École nationale de la magistrature en 1984 et débute sa carrière comme substitut du procureur à Cahors (1984-1989), puis à Tours (1990-1994). Il poursuit en tant que procureur de la République à Cambrai (1994-2000) et à Moulins (2000-2004).
De 2004 à 2007, il exerce comme procureur à Senlis avant de devenir directeur adjoint des affaires criminelles et des Grâces au ministère de la Justice. Il revient ensuite au terrain en prenant la fonction de procureur, à Rennes (2011-2016), puis à Lille (2016-2020). En février 2020, il est nommé procureur général près la Cour d’appel de Dijon, avant de rejoindre Rennes en septembre 2024. Durant sa carrière, il a été décoré de la médaille d’honneur de l’administration pénitentiaire (2004), élévé au grande de chevalier de la Légion d’honneur (2009) et officier de l’ordre national du Mérite (2018).
Infos + : la seconde priorité sera la lutte contre la violence faite aux enfants. «Je sais pouvoir compter sur la mobilisation de la protection judiciaire de la jeunesse, toujours à nos côtés comme elle l’a été dans l’application de la réforme du code de justice pénale des mineurs. Je souhaite que son action dépasse les difficultés actuelles et que sa place essentielle soit pleinement reconnue. Ce travail doit mobiliser aussi le monde de la santé, l’hôpital et le service de la médecine légale qui est un pont précieux entre nos deux univers. Le développement des unités d’accueil hospitalier des victimes mineures, mais aussi la police et la gendarmerie et l’aide sociale à l’enfance, seront aussi une contribution essentielle à cette mobilisation autour de l’enfant victime.»
