« Gare au gorille », chantait Georges Brassens dans sa célèbre chanson satirique. Mais pas de panique : celui que Melissa Follet a fait surgir sur le M.U.R. de la rue Vasselot n’a rien d’une bête en furie. Calme, majestueux, presque méditatif, ce gorille semble plus proche de ceux que cajolait la primatologue Dian Fossey dans les montagnes du Rwanda que de l’immense King Kong agrippé au sommet de l’Empire State Building.
Melissa Follet, la 43e artiste invitée à s’exprimer sur ce mur emblématique de Rennes, a choisi la nuit et le jour pour peindre. Lampe frontale parfois vissée sur la tête, sèche-cheveux à la main pour fixer les pigments dans le froid, elle a su imposer son style tout en contrastes. Son gorille, au regard pénétrant, nous observe encore jusqu’à la mi-avril — et il serait dommage de passer à côté avant qu’un 44e peintre ne recouvre son œuvre.
Une intensité sauvage
« Deessiner a toujours été pour moi un moyen d’apaisement. C’est comme si chaque coup de pinceau, chaque coup de crayon était un morceau de moi que j’extériorisais sur la toile », confie-t-elle sur son site. « Peindre me fait me sentir vivante. Libre. Expressive. Comprise. » Ce que l’on ressent en découvrant son ouvrage, c’est avant tout une maîtrise bluffante du clair-obscur. par laquelle elle révèle la lumière comme on exhume un secret.
Melissa Follet n’humanise pas l’animal : elle nous animalise, nous renvoie à notre part enfouie : l’émotion pure. « Par cette émotion si puissante, je cherche à capter l’attention des animaux humains. Je tends à montrer ce qu’on a eu tendance à ignorer, à camoufler, à faire taire. » À Rennes, son gorille nous fixe comme un rappel à la nature, à notre nature. Et si ce n’était pas lui qu’il fallait craindre, mais ce qu’il nous révèle ?