Le lundi 4 décembre, à 22 h 38, le proviseur du lycée de Bréquigny recevait sur sa messagerie professionnelle des menaces écrites en arabe et en français où il était revendiqué la pose de plusieurs bombes. « Ce message pouvait être qualifié de choquant. Il était illustré par un plan pouvant être celui de l’école et d’une photo d’un engin explosif improvisé, équipé d’un cadran numérique horaire fixé à 13 h 12 min 38 s » explique le procureur de la République, Philippe Astruc. « Deux clichés représentaient des prisonniers de l’État islamique avant exécution et un drapeau de Daesh. »
Immédiatement, les policiers de la direction départementale de la Sécurité publique évacuaient l’établissement scolaire (3500 élèves, 500 professeurs et administratifs). Il levait tout doute, le 5 décembre 2023, à 8 h. « Les recherches s’avérant vaines, l’activité normale reprenait à 9 h 20 », ajoute le magistrat. Dans le cadre de cette affaire, le parquet saisissait alors la direction territoriale de la Police judiciaire qui confiait l’enquête à la division de lutte contre la criminalité organisée et à l’antenne de l’Office anti-cybercriminalité (Ofac).
Les investigations techniques permettaient d’identifier un mineur âgé de 15 ans, né à Orléans. Cet adolescent était scolarisé en seconde générale au lycée Bréquigny. Il était interpellé à 11 h 20, le 6 décembre, discrètement, dans l’enceinte de l’établissement. « Il reconnaissait spontanément les faits », explique le procureur. « La perquisition opérée à son domicile permettait la saisie d’un smartphone, d’un ordinateur et d’une clé USB. L’exploitation de ces supports numériques confirmait les aveux initiaux et mettait en évidence de nombreuses consultations d’un site diffusant notamment des scènes de décapitation perpétrées par Daesh. L’installation spécifique de VPN pour commettre les infractions était également corroborée. »
Interrogé sur sa potentielle radicalisation, l’adolescent niait toute adhésion à l’Islam radical. Il expliquait l’envoi des menaces au lycée Bréquigny par sa colère. Il délivrait deux arguments essentiels : le refus de sa mère d’accepter un changement d’orientation et volonté d’éviter un cours de français où ses résultats sont médiocres. Déféré ce jour au parquet de Rennes à l’issue de la garde à vue, il a été présenté à un juge des enfants. Il comparaîtra le 9 février 2024 notamment pour menace de mort ou d’atteinte aux biens, commis en raison de la race, l’ethnie, la nation ou la religion ( 7 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende).
Le jeune homme a été dans l’attente placé, conformément aux demandes du parquet sous contrôle judiciaire avec notamment interdiction de se rendre dans cet établissement scolaire. « Ce type de menace particulièrement inacceptable constitue une atteinte grave à la tranquillité de la communauté éducative. Il conduit à mobiliser d’importants services de police ou de gendarmerie au préjudice d’autres missions, et présente au surplus un caractère spécifiquement anxiogène dans le contexte très réel de danger terroriste que nous connaissons. » Au total, 85 fausses alertes à la bombe sont à déplorer depuis le 19 septembre 2023 sur le ressort du parquet de Rennes pour l’essentiel dans des établissements scolaires, dans des cinémas ou à l’aéroport.
L’adolescent est la troisième personne identifiée. Un premier mineur l’avait été dans le cadre de la fausse alerte du 19 septembre à la cité Ozanam (réponse pénale identique). Tandis qu’un majeur l’avait été pour les mêmes raisons le 29 octobre à l’école primaire d’Iffendic. Son état psychique ayant été jugé incompatible avec la mesure de garde à vue, il a fait l’objet d’une hospitalisation en milieu spécialisé. Une expertise psychiatrique a été ordonnée afin notamment d’apprécier de son degré de responsabilité. »