L’Unité de valorisation énergétique (UVE) de Villejean continue de susciter de vifs débats. Ce chantier, mené par l’entreprise italienne Ruths, a été interrompu durant de longs mois en raison de « doutes sérieux sur les chaudières ». Jeudi dernier, le dossier a rebondi au conseil métropolitain, à l’occasion de la présentation du rapport de la mission d’évaluation et d’information sur les travaux. Si la majorité salue la transparence, l’opposition s’interroge toujours sur le rôle de la métropole.
Durant les débats, les commentaires sont allés bon train. « Quel que soit le partage des responsabilités, le constat est sans appel », explique Charles Compagnon (centre droit). « Ce fiasco, pour nous, illustre l’incapacité de la gouvernance métropolitaine à piloter efficacement un projet d’une telle envergure. » Du côté de la majorité métropolitaine, Michel Demolder, président de la Collectivité Eau du bassin rennais, pointe du doigt l’attitude de Ruths. « Ce n’est pas aux habitants de financer les dérives d’une entreprise et de sa façon d’agir. Il restera à nous retourner contre les Italiens pour non-respect du cahier des charges. »
Le risque aurait été grand que l’État ne valide pas la mise en service de notre ouvrage. » ValériE Faucheux.
Chez les écologistes, la mission d’information et d’évaluation a permis à ses membres de rentrer dans la complexité de ce dossier très technique et de mieux cerner les positions de Rennes métropole. « Ruths n’a fait que minimiser les problèmes détectés. Il ne les a pas pris en compte. Il n’a produit que des réponses partielles, voire aucune réponse du tout. La métropole a fait le bon choix pour assurer la pérennité sur le long terme de cette installation classée et garantir la sécurité pour celles et ceux qui en ont la charge de son exploitation. »
Nathalie Appéré, maire de Rennes, a salué le travail réalisé et défendu la gestion de la métropole face à cette crise. «Ce rapport permet de retracer très fidèlement ce qu’a été la chronologie des faits depuis l’appel d’offres jusqu’à l’attribution du marché de substitution en passant évidemment par ce moment de l’arrêt des opérations. Cette interruption a été purement et simplement salutaire. Si nous avions écouté l’opposition, nous nous trouverions aujourd’hui dans une impasse inédite, avec un équipement en passe d’être livré, mais totalement non conforme par l’État. Grâce à l’excellence des services métropolitains, à la réactivité de la maîtrise d’ouvrage et à l’anticipation de la collectivité, nous avons pu ensemble prévenir le pire. »
Si la majorité se félicite d’avoir empêché une catastrophe, l’édile de Mordelles, Thierry Le Bihan (groupe des maires indépendants), a rappelé les incidences de l’interruption du chantier, notamment sur le plan écologique. « L’impact environnemental est très conséquent, avec plus de 44 000 tonnes d’émissions de CO₂ par année d’arrêt, dû à l’utilisation de gaz pour le chauffage urbain. Aujourd’hui, l’incertitude demeure sur une mise en marche de l’UVE de Villejean pour le début de l’année 2026. »
La position intéressante du maire de Mordelles.
Tout aussi longuement, le maire de Mordelles a rappelé l’importance du coût pour les contribuables. « La taxe des ordures ménagères a augmenté de plus de 70 % en passant d’un taux de 5,7 % à 9,85 % en seulement trois années. » Face à la complexité du dossier, il estime ne pas être aujourd’hui en mesure de porter une opinion tranchée. « L’analyse des propos exposés étant éminemment technique, nous n’avons pas en tant qu’élus suffisamment de compétences pour nous permettre un tel jugement. »
Dans ce dossier, Thierry Le Bihan regrette encore le manque d’un conciliateur neutre pour apaiser les tensions entre la collectivité et Ruths. « L’absence de médiation externe et indépendante aurait permis aux deux parties de mieux se comprendre mutuellement. En judiciarisant rapidement la relation entre les deux organismes, les conseillers juridiques et avocats ont certainement pris le dessus, rendant ainsi impossible une conciliation sur le sujet. »
Enfin, Thierry Le Bihan a soulevé les difficultés liées au choix d’un marché de conception-réalisation pour ce projet. « Ce marché empêchait la métropole de disposer du dossier de conception dès le démarrage des travaux. Il risquait d’entraîner une divergence de vues entre l’entreprise qui réalise l’équipement et la société qui l’exploite. Surtout lorsque cette dernière fabrique elle aussi ce type d’ouvrage ! » Alors que la polémique se poursuit, l’absence des représentants de Ruths lors de la présentation de ce rapport était-elle pertinente pour garantir la transparence du débat ?