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mardi 26 mars 2024
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JEAN HUITOREL : UNE FIGURE RENNAISE S’EST ÉTEINTE

Tous ceux qui, à Rennes et en Bretagne, ont lancé une fois le javelot, sauté à la perche, chaussé des pointes l’ont connu. Il s’appelait Jean Huitorel. Figure de la résistance et de l’athlétisme breton, il est décédé le jeudi 6 avril à l’âge de 96 ans. Il a marqué le 20ème siècle rennais par son héroïsme durant la dernière guerre, sa carrière de professeur à l’École Normale et son engagement dans l’athlétisme breton. 

                          Un homme des Forces Françaises Libres

Jean Huitorel est né à Paimpol en 1920. Il se révèle très vite comme un sportif : dans les courses de pardon et comme footballeur à l’Amicale Laïque de Châteaulin. Le 19 août 1943, il s’enfuit avec quelques jeunes en direction de l’Espagne où il est emprisonné. Il est miraculeusement libéré à la fin de l’année 43 et se retrouve à Malaga d’où il rejoint Casablanca. C’est là qu’il choisit avec ses compagnons de route sans aucune hésitation les Forces Françaises Libres.

Avec son ami, Louis Périou, ils traversent le Maghreb et arrivent en Tunisie où Jean devient tireur sur un des obusiers de sa brigade. Au sein de la première division, aux ordres du général Brosset, ils vont à Annaba en Algérie d’où ils vont partir pour débarquer à Naples le 27 avril 1944 afin de participer avec le corps expéditionnaire français aux combats de mai 44 à la bataille du Mont Cassino. En août 1944, ils débarquent en Provence puis marchent vers Colmar pour participer à la bataille d’Alsace contre les forces allemandes.

Suite à cet épisode glorieux, Jean aurait pu devenir militaire, un gradé décoré des plus prestigieuses médailles. Non, il préfère suivre sa fibre sportive et devient éducateur sportif et professeur à l’École Normale de Rennes de septembre 1951 à 1976. « Dans le domaine pédagogique, il avait l’habitude de ne rien demander qu’il pût faire lui-même. La compétence, le niveau d’exigence, le dévouement, la simplicité dans son comportement ont engendré, chez ses élèves, admiration et sympathie », confie Gilbert Nicolas, président de l’Amicale des anciens élèves de l’École Normale de Rennes, dans Jean Huitorel, Itinéraire républicain d’un éducateur engagé (éditions Skol Vreizh, 2006).

                                     Un grand du Stade Rennais Athlétisme

Au Stade Rennais athlétisme, Jean Huitorel côtoie de nombreuses générations d’athlètes. Il entraîne Robert Poirier ou le fameux 4 X 400 mètres des années soixante, composé de Gilles Bertould, Gérard Le Bolc’h, René-Jean Delanoë et Francis Kerbiriou. Aux JO de Munich, trois de ses athlètes du Stade Rennais furent même sélectionnés : Robert Leborgne au 1500, Gilles Bertould et Francis Kerbiriou dans le relais 4 X 400.

En septembre 1987, Jean Huitorel met fin à ses activités. « Aujourd’hui je ne regrette rien, » écrit-il dans ses Mémoires. « Aussi bien auprès des jeunes élèves-maîtres de l’École Normale que des athlètes du Stade Rennais, j’ai passé des moments exaltants. Nous avons toujours respecté l’adversaire, les règlements fédéraux, accepté la défaite et, quand la victoire était là, nous étions satisfaits ».

Voilà l’homme, l’humaniste que tous ceux qui l’ont connu décrivent avec émotion. « C’était un éducateur humaniste qui a formé un très grand nombre de futurs éducateurs, qui a fait découvrir le meilleur du sport dans la persévérance, qui a mis en valeur la participation individuelle au sein d’un collectif en donnant un intérêt majeur aux championnats interclubs, reflets de la vitalité d’une association de sport individuel », confie Marcel Touchais, ex-président du Stade Rennais Athlétisme (photo ci-joint).

Anecdote : En 1947, en portant un article à la rédaction brestoise du journal, le chef de rédaction, Jean Klein, lui annonça qu’il allait accueillir Guillaume Seznec à la gare SNCF après avoir passé 24 années au bagne de Cayenne. Jean Huitorel partit avec le journaliste l’accueillir puis l’interview continua dans un café à l’octroi, le Petitbon. La seule chose qu’il entendit de Seznec fut cette petite phrase : « en tout cas, je peux vous dire que je suis innocent. »

 

Dragan Brkic
Dragan Brkic
Écrivain, j'ai publié Le Petit Noir des Balkans, Prière d'insérer, La condition pénitentiaire, Footness et Comprendre la délinquance française.

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